La revue de presse de La Veillée
“Un village d’entresort, un spectacle en caravane. Voilà déjà un ton, une attention, une promiscuité fragile à jouer à fleur de spectateur… Nous embarquons passionnément pour ce genre d’aventure. Et là il s’agit vraiment d’embarquement, le temps de quitter terre et nous voilà en mer serrés les uns aux autres sur un petit rafiot, au coin du lit d’Ernest vieux marin au bout du voyage qui tangue entre présent et rivages lointains. Entre réalité et souvenir, cela nous conte la vie, l’amour, l’histoire d’un homme et le souvenir de sa femme, la complicité de la fille acceptant le délire du père, ce vieil homme hanté par le souvenir de son amour perdu, de son Irène. Nous sommes au chevet du marin, nous naviguons à vue et à mirage entre présent et passé magnifié. Nous assistons à la veillée, dans l’intimité du moment partagé, à portée de souffle, nous sentons la chaleur du groupe. Et il y a de l’impudeur, de la douleur tout autant que de la douceur à se frotter de si près, à être sur la barque, le temps du passage offert. Temps suspendu à huis clos et huit spectateurs. Un beau voyage dans l’intime, tangage et poésie, nous sortons riches de ce moment partagé avec cette étrange sensation d’avoir fait le voyage au bord de la barque de Charon…
La force de l’entresort : donner un jeu à toucher les spectateurs tant physiquement qu’émotionnellement. Sur une forme courte de 20 minutes et pourtant le voyage nous emmène loin, très loin… Anaïs Blanchard et Manuel Marcos signent là une pièce de belle facture, se jouant du temps, des rôles et où les changements de plateau se font, se vivent à vue.”
Remonter le courant, Zoom La Rue, le 21 mai 2014.
“Après Chalon dans la rue et bien d’autres évènements, les Chalonnais du Collectif Alteréaliste se sont installés à l’Abattoir afin de participer au Quartier de lune d’hiver. Chaque représentation de ce festival d’art de rue, qui se terminera ce soir, s’est démarquée de part son originalité. Les Alteréalistes n’ont pas dérogé à cette règle avec leur pièce La veillée. Manuel, l’un des acteurs explique : « Nous voulons emmener les spectateurs là où ils ne s’y attendent pas. » Mission réussie avec leur scène improvisée à bord d’une caravane, qui, l’espace de 20 minutes, s’est transformée en bateau. Et si les roulis n’ont pas retourné l’embarcation, ils ont cependant secoué les esprits. Quant à l’histoire, aussi étrange que cela puisse paraître, il ne faut surtout pas raconter le début, ça risquerait de faire partir les spectateurs dès la fin.”
Thomas Borjon, L’endroit qui met à l’envers, Le Journal de Saône-et-Loire, le 8 décembre 2012.
“Quant aux formes, elles restent étonnamment variées. On grimpe la nuit dans la montagne pour écouter, dans l’obscurité, des mots étranges sortant de longs tuyaux (Pleine forêt sensible, des Souffleurs commandos poétiques). On y grimpe le jour pour se retrouver otages d’une bande de (vrais) enfants blonds qui nous dépouillent de nos effets personnels puis nous font subir diverses brimades : l’aventure fait ressentir physiquement l’inversion du rapport enfants/adultes, avec un zeste d’expérience concentrationnaire (Wasteland, de la Néerlandaise Alexandra Broeder). A l’opposé, dans le off, allez vivre trente minutes de tendresse en vous entassant à dix – dont deux comédiens – sur et même dans un lit d’une place, où un vieux capitaine raconte l’histoire de sa vie (la Veillée, Collectif alteréaliste).”
Edouard Launet, Rimes vaudoues à Aurillac, Libération, le 24 août 2012.
“Avant d’être appelé pour entrer dans la petite caravane confinée où le spectacle à lieu, je dois attendre sur des chaises à côté avec des inconnus. Un couple arrête pas de faire des blagues de prolétaires et de rigoler, on s’ennuie alors on essaie d’inventer un jeu avec un mille patte translucide que la femme a acheté dans un magasin d’électronique, qui, selon le vieil homme assis en face de moi, est en silicone. Deux garçons à côté de moi sont un peu silencieux, ils ont l’air jeunes et intelligents et ils sont venus de France ensemble. Cette attente étrange qui nous lie avec distance, moi et ces inconnus, fait déjà presque partie du spectacle. On peut essayer d’ignorer les humains toute l’année en regardant droit devant soi dans la rue, mais dans un wagon de train, une chambrée ou une caravane on est obligé de se rendre compte que nos destins se touchent, on est obligé de regarder les autres et de constater que ce sont des humains comme nous qui vont quelque part faire quelque chose. Les deux personnages du spectacle sont comme une exagération de ce phénomène, puisqu’on est carrément présent dans les scènes de leur vie.
Une jeune fille ouvre la porte de la caravane et nous fait rentrer. Il y a une chambre, la porte se ferme, ça tangue, on est dans un bateau. À ce moment, là, la distance s’efface et on est vraiment embarqué dans la même galère que les inconnus. Je comprends que je pars en voyage. Le fait d’être dans un bateau aide carrément à s’imaginer ailleurs. Avec mes compagnons de voyage, nous sommes parfois existants aux yeux des occupants du bateau, parfois invisibles. Le fait d’être moi-même une pathétique hallucination a tendance à me faire croire que les acteurs sont bien réels. Souvent, pourtant, nous sommes rappelés à la réalité du bateau, vaguement interpellés. Nous sommes pour les amants les figurants oubliés, les passagers de chambrée qui ont un jour composé une scène de leur histoire d’amour, tout comme votre compagnon de train est un figurant de votre journée alors que vous êtes un figurant de la sienne. L’histoire est simple et classique, mais belle, et rappelle un de ces rêves ou l’on à l’impression de vivre toute une vie en une nuit. On est réellement comme dans un rêve. La réalité est constamment déformée. Les personnages jouent différents rôles, la mère devient la fille, l’homme devient enfant, la cale dans laquelle nous sommes assis change de fonction en restant la même et ce mélange d’apparence et de sens, cette confusion logique, est exactement la même que dans un rêve étrange et nostalgique. Cette formule donne toute liberté à une succession de scènes différentes et à notre état de mirages. Les autres spectateurs font partie du spectacle. Le vieil homme regarde en l’air, tantôt souffrant du chaos, tantôt fermant un peu les yeux et souriant avec émotion. La femme à la chenille de silicone joue comme une fillette complice.
Toute cette étrangeté aide à me transporter complètement ailleurs. Dire que ce spectacle m’a fait voyager n’est pas qu’une métaphore poétique de merde.”
L.G, Le Périscope, blog de la Plage des Six Pompes, le 6 août 2012
“C’est comme un gigantesque terrain d’aventure, (…) on est tous là à guetter le choc, le coup de folie qui va être débusqué à chaque coin de rue, place, parking ou cour d’école, et c’est vrai que j’ai vu des créations, pendant deux jours, assez dingues, provocatrices souvent même, et qui se jouent à des échelles très extrêmes : ça peut être très intimiste, ça va d’une petite pièce qui, par exemple, moi je l’ai vue hier matin, est jouée dans une toute petite et vieille caravane sur un parking, et je me suis retrouvée avec 6 spectateurs carrément sur le lit d’un comédien, ça s’appelle La Veillée, avec les Alteréalistes de Chalon, et puis à l’opposé avec une compagnie comme Komplex Kapharnaüm,(…) où on se retrouve carrément projeté dans une manif de mai 68, à minuit dans les rues de Chalon…”
Isabelle Pasquier, le 7/9, Le Grand Journal des Festivals, France Inter, le 20 juillet 2012.
“C’est devenu une constante que de découvrir dans les festivals de rue de petits bijoux… enfermés dans des écrins de quelques mètres carrés. Le Begat Théâtre a marqué les esprits avec ses merveilleuses Demeurées d’après le texte de Jeanne Benameur, vues à Aurillac, Chalon et Villeneuve les Avignon entre autres, en caravane. Là, dans le In , c’est la Khta compagnie qui reprenait « Je suis une personne » vu au Théâtre Monfort, proposition fine et sensible en container. Dans le off, on découvrait La Veillée : une caravane pour huit personne et deux acteurs, qui se transforme en vaisseau fantôme pour évoquer la balade d’un vieux marin… Juste et intéressant.”
Microcassandre, Il n’y a pas qu’Avignon dans la vie! Mais aussi Chalon…, le 24 juillet 2012.
“Le collectif chalonnais alteréaliste ne transige pas avec ses principes, qui sont autant de pistes de travail à explorer et développer. Sa quête du Graal revêt des formes à la fois lointaines et extrêmement proches : la mémoire, le souvenir, mais aussi l’intimité. Et il arrive que ce mélange associe ses particularités pour les besoins d’un scénario. « La Veillée » en est la parfaite illustration, laquelle a fait un tabac à Chalon dans la rue, tant par le succès populaire que par l’intérêt manifesté par des médias tels que France Inter ou Télérama. L’expérience s’avère insolite, avec une intrusion dans une caravane dont la jauge n’est que de huit spectateurs. Voyeurs impudiques à la limite devrait-on dire, puisqu’il était carrément impossible d’être plus au cœur de l’action qu’à l’occasion de cette plongée dans le sanctuaire du moi profond d’Ernest. Outil principal, la machine à remonter le temps et sa propension à faire jaillir les marques indélébiles. Les premiers instants atteignent déjà le paroxysme de la vie d’un homme à l’article de la mort. A la faveur d’un petit bateau en papier, fragile et dérisoire esquif, cependant ô combien important pour déclencher le processus des réminiscences. L’ancien capitaine, la mer et tout ce qui gravite autour, son implacable dureté au point d’engloutir son épouse Irène, l’amour en lambeaux…Jusqu’au point de départ, l’enfance et ses rêves, encore et toujours avec dans l’œil du cyclone ces grandes étendues d’eau sauvage qu’il faut dompter. Pendant tout ce temps les privilégiés compatissent à l’intérieur du véhicule aménagé, retiennent leur souffle sur le lit transformé en terre d’asile et rafiot, subissent les aléas des conditions climatiques, tombent de Charybde en Scylla en luttant contre les éléments déchaînés comme s’ils y étaient. Bref sont embarqués de plein fouet dans une double histoire d’amour : celle de la mer qui prend l’homme, et celle qui unit un homme à une femme. De la belle ouvrage née de l’esprit fécond d’Anaïs Blanchard et Manuel Marcos, auteurs-comédiens-metteurs en scène . Pour un peu, on en resterait coi. Parmi les huit perceurs d’intrigue, un couple de Parisiens, Patrick et Julie, fidèle du festival. C’est Monsieur qui nous restitue ses impressions. « Nous sommes coupés du monde, de ce qui pourrait nous gêner, on se retrouve seuls au milieu de la mer. J’ai trouvé ça super. On est sur un lit, c’est très intéressant. Dès le début nous sommes sur un lit de mort, c’est prenant, ça peut nous rappeler ce que l’on a connu avant. C’est presque un peu angoissant, et c’est bien que ce soit à rebours.”
Michel Poiriault, Chalon : La mer preneuse d’otages avec le collectif alteréaliste, Infos Chalon, le 23 juillet 2012.
“Quatre jours de festival et beaucoup d’images dans la tête. Il y a des spectacles qui sont sortis du lot. Voici quelques exemples de ce qu’il ne faut pas rater aujourd’hui.
La Veillée, Collectif Alteréaliste : Spectacle intimiste dans une caravane, souvenirs enfouis qui doivent ou qui vont remonter à la surface. Ernest le marin se souvient et nous entraîne dans son univers. Le spectacle a eu tellement de succès que des horaires ont été ajoutés pour satisfaire le public.”
Le Journal de Saône-et-Loire, Coups de coeur : C’est sûr, il ne faut pas les rater, le 22 juillet 2012.